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Yves PAUWELS (CESR Tours)

Yves Pauwels, ancien élève de l’ENS, agrégé des Lettres, ancien pensionnaire de l’Académie de France à Rome, professeur d’histoire de l’art à l’Université de Tours (Centre d’études supérieures de la Renaissance). Auteur de nombreuses publications sur les rapports entre théorie et pratique de l’architecture et sur les liens entre architecture et rhétorique à la Renaissance et au XVIIe siècle. Dirige au Cesr le programme Architectura (http://architectura.cesr.univ-tours.fr) et la collection « Arts de la Renaissance européenne » chez Garnier.

 

Statut et fonction de la représentation de l¹architecture chez les trattatistes de la Renaissance

L’architecture antique tient une place prépondérante dans les traités d’architecture publiés à la Renaissance, depuis le Terzo libro… nel qual si figurano e descrivono le antiquita di Roma… de Sebastiano Serlio (Venise, 1540) aux Quattro libri d’Andrea Palladio (Venise, 1570), en passant par la Reigle generalle d’architecture de Jean Bullant (Paris, 1564) et le Premier tome de l’architecture de Philibert De l’Orme (Paris, 1567). Toutefois, la fonction de la représentation textuelle et graphique des monuments antiques y est particulière, dans la mesure où elle est liée non pas à une recherche de type antiquaire ou archéologique mais aux besoins très concrets de la création architecturale contemporaine. De ce point de vue, la perception des édifices antiques est moins globale que fragmentaire : on n’a plus besoin de construire des temples, des thermes ou des amphithéâtres, mais de trouver les éléments d’un langage susceptible de conférer aux édifices modernes une légitimité esthétique puisée dans le legs romain. Aussi verra-t-on surtout dans les traités une architecture fragmentée, réduite aux éléments décoratifs, en particuliers les ordres d’architecture, réutilisables dans une église ou sur la façade d’un château. L’étude tâchera d’analyser les modes de sélection, d’appréhension et de reproduction de ces membra disjecta en les mettant en rapport avec la pratique contemporaine, essentiellement en France où, du fait de l’éloignement et de la rareté des voyages en Italie, le rapport à l’antique est plus que dans la Péninsule dépendant du media imprimé. Elle montrera aussi comment, en conséquence, la diffusion des images dans les milieux extérieurs aux chantiers est un élément essentiel du fonctionnement de l’esthétique « maniériste » de la seconde moitié du XVIe siècle : elles donnent aux spectateurs la culture visuelle référentielle permettant l’identification des citations, des effets d’imitation – ou de distorsion – par rapport aux modèles, et valorisent à la fois l’édifice considéré dès lors comme un texte à interpréter, et l’architecte, promu au rang d’un humaniste par l’affichage de cette culture « altiloque », pour parler comme du Bellay.

 Pauwels

 P. De l’Orme, fragment de corniche antique (Le premier tome de l’architecture, Paris, 1567, f. 153)

 

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